Le Burundi préhistorique

 
 
 
Sommaire

I Le pays 

II Le Burundi dans le contexte de la préhistoire orientale

III La  problématique du peuplement du Burundi.

 


 
 

I Le pays 

Le Burundi est situéen Afrique au sud de l'équateur. Il est limité au nord par le Rwanda, à l'est et au sud par la Tanzanie et à l'ouest par la République Démocratique du Congo (ancien Zaïre) le long de la dépression du lac Tanganyika et Kivu que relie la rivière Rusizi. Le pays s'étend sur 27.834 Km 2. Il est à 1.100Km de l'océan indien, à 1900Km de l'océan atlantique et à 2.300Km de la mer Rouge.

Le Burundi a un relief mouvementé. Un grand bouleversement géologique a provoqué la création d'un gigantesque fossé d'effondrement où s'étend les lacs Kivu à 1460 m et le lac Tanganyika à 773 m d'altitude. Au bord de ce fossé se trouve une chaîne de montagnes dont la crête la plus élevée sépare les eaux du bassin du Nil de celle du Congo. De nombreux massifs volcaniques parsèment ce fossé, comme les Virunga au nord ouest du Rwanda.

La chaîne qui sépare les eaux du Nil et les eaux du Congoa une altitude comprise entre 2000 m et 3000 m. A l'est de cette chaîne se trouvent les hauts plateaux qui descendent en gradin de 1800 m à 1400 m. Ils sont découpées en vallées étroites et profondes par des rivières.

Concernant le climat, Burundi connaît dans l'ensemble un climat tropical humide propice au peuplement. Les pluies sont moins abondantes dans la vallée de la Rusizi. La crête Congo-Nilqui sert de ligne de partage entre les eux du Nil et des eaux du Congo a des pluies plus fréquentes. Sur les plateaux, les pluies y sont également abondantes. Dans l'ensemble, on distingue quatre saisons: la petite saison sèche, de janvier à février, la grande saison des pluiesde mars à mai, la grande saison sèche de juin à septembre et la petite saison des pluies d'octobre à décembre.

II Le Burundi dans le contexte de la préhistoire orientale

L'étude ancienne de l'histoiredu Burundi est placée dans le cadre de la préhistoire de l'Afrique orientale et en Afrique des Grands lacs. En effet, la géologie et la géographie rattachent le Burundi à l'Afrique de l'est. Or, les conditions climatiques ont joué un rôle important dans le peuplement de cette région. Le Burundi occupe une position particulière pour les civilisations anciennes de l'Afrique orientale et la région des grands lacs. Sa position géographique le mettait en contact avec les civilisations de la savane à l'est et de la forêt dense à l'ouest.

Actuellement, il est établi que le peuplement de l'Afrique de l'est est très ancien grâce aux objets archéologiques recueillis. Ainsi, à l'état actuel des recherches, l'Afrique orientale est considérée comme le berceau de l'humanité. Le squelette de l'homme le plus ancien a été trouvé en Afrique de l'est.

Pour le cas du Burundi, les recherches sur la préhistoire ne sont pas encore très avancées. Cependant, quelques découvertes ont été réalisées et montrent que le Burundi a connu l'une des civilisations les plus anciennes. Des chercheurs archéologues ont découvert au Burundi des outils archéologiques en pierres semblables à ceux produits par des industries lithiques de la région de l'Afrique orientale et centrale. 

Exemples: L'acheuléen (500.000 ans ) a été découvert à Nyarunazi, Karunyinya, le Sangoen-Lupembien inférieur (100.000 ans) a été découvert à Nyakeru, à Mugera, à Bururi,, le Lupembo-Tshitolien(20.000 ans ) a été découvert à Rumeza. Des sites de l'age du feront été également découvert à Masango, Mubuga, Murama, Nyamugari, Rwiyange...

III Laproblématique du peuplement du Burundi.

Les chercheurs se sont toujours interrogés sur le peuplement du Burundi dans le passé lointain. Desthéoriciens anthropologuesont décritle peuplement du Burundi comme le résultat des mouvements migratoires etsuccessifs dedifférentes "ethnies" du pays.D'après la théorie hamitique, leBurundi a été d'abord occupépar lesBatwa, ensuite par les Bahutu et enfin par les Batutsi . Il y a aussi une autre composante, la dynastie princière "Ganwa" dont l'origine est mystérieuse, comme nous le verrons avec la fondation de la monarchie Ganwa.La littérature coloniale confondait parfois les Ganwa avec les Tutsi alors qu'il s'agissait de deux oomposantes socialestotalement différentes

Les tenants de lathéorie hamitique affirment queles Batwa 1 ont été les premiers à occuper le Burundi. Ils sont rangés dans la race des pygmoïdes. Ils se sont retirés au fur et à mesure que les cultivateurs hutu défrichaient le pays. 

Les Bahutu 2 ont ainsichasséprogressivement les Batwa . Ils étaient agriculteurs et connaissaient la houe et la serpe. Ils ont conquis la forêt, là où le terre était encore fertile pour faire leurs cultures. ils seraient originaires des contrées lointaines d'Asie ou d'Australie selon la théorie hamitique.Ils constituent la majorité de la population. 

Les Batutsi 3 sont considérés comme un peuple éleveur venu de l'Ethiopie et même de l'Asie. Ils étaient pasteurs et se sont imposés petit-à-petit sur les Bahutu parce qu'ils avaient une richesse qui reposait sur le bétail.

La littérature coloniale faisait également une distinction entre les Tutsi: Sous la dynastie Ganwa, Il y avait les "Tutsi-Banyaruguru" qui constituaientune classe noble, dont les membres pouvaient se marier avec les membres de l'aristocratie ganwa tandis que les "Tutsi-Hima" étaient pris pour une "race impure". Ainsi par exemple, ils n'avaient pas le droit de traire les vaches du roi.

Lathéorie hamitiqueest actuellement contestée par la plupart des chercheurs historiens et anthropologues du fait qu'ellemanquede sources fiables pouvant confirmer les thèses qu'ellevéhicule. De plus, les descriptions faites de chaque ethnierelève dela pure subjectivité. Elle ne repose sur aucune expérience d'ordre scientifique (biologique ou psychologique) si bien que les différentes descriptions ne sont quedes stéréotypesqui ne répondent à aucune rigueur scientifique.

On remarque aussiqu'il y a souvent confusion entre le Mututsiconsidéré comme seigneur conquérant et la dynastie princière Ganwa qui a régné sur le Burundidès la fin du XVIIème siècle jusqu'en 1966. Le Mututsi est considéré comme un race noble par rapport au Muhutu , le Mutwa est décrit comme étant une "caste inférieure ", mise en quarantaine aussi bien par les Batutsi que les Bahutu.

Cette description anthropologique faite sous la colonisation a constitué le fondement des clivages ethniques que traverse la région des grands lacs actuellement. Au Burundi comme au Rwanda, des idéologies à caractère raciste reposent sur ce genre dedescriptions et sontà l'origine des actesde génocide et de répressionqui ont fait des milliers de victimes depuis la fin de la colonisation belge. 

Pourtant, comme nous allons le voir dans les chapitres à suivre; Bahutu, Batutsi et Batwa n'ont jamais connu de guerres entre eux pendant la période précoloniale et coloniale. Le fléau de clivages ethniques qui ravage le Burundi, le Rwanda et l'est du Congo Démocratique ne s'est manifesté pour la première fois qu'en 1959 au Rwanda. 

Il y a lieu de croire ainsique Batutsi, Bahutu et Batwa ont toujours vécu en symbiose: Des Hutu étaient éleveurs comme des Tutsi s'occupaient de l'agriculture. Les Batwa se sont spécialisés dans la céramique et la poterie dont les gens se servaient comme ustensiles de cuisine et autres. La majorité de Hutu et de Tutsi ont toujours vécu les mêmes conditions de vie. Plus tard,le pouvoir dynastique Ganwa les a dominés de la même manière, certaines familles de Hutu ou deTutsi étaient attitrées pour telle ou telle autre fonction à la cour royale.

Quant à l'origine et le comportement des uns et des autres, les recherches devaient continuer pour mettre suffisamment d'éclairage sur l'histoire du peuplement de la région des grands lacsafin de mettre fin aux spéculationslégendairesdont les effetspervers continuent à déchirer lesGrands Lacs au risque même d'embraser tout le continent africain . 


1 D'aprèsLouis de Lacger du clargé d'Albi: Ruanda, imprimé à Kabgayi le 9 juillet 1959, "Les Batwa sont rangés par les anthropologistes et les ethnographes parmi les négrilles qui, avec les négritos de l'Indonésie et de l'Asie ,forment la grande famille des pygmées. Du négrille,ils ont certains caractères somatologiques: tête courte, nez plat et écrasé, lèvres épaisses proéminentes, bouche largement fendue, épaules carrées, membres mal proportionnés au tronc, poitrine velue, aspect général disgracieux et vulgaire, et certains caractères économiques, répugnance pour la culture et l'élevage, goût pour la vie des bois, simplicité extrême de l'installation et du mode d'existence. Ils en diffèrent toutefois par leur passage graduel à la vie sédentaire, artisanale, voire agricole , et surtout par la taille...le mutwa atteint en moyenne , 1,59m, et par là se tient tout près du Muhutu. Le terme pygmée ou nain ne lui convient donc pas. Il faut parler de lui comme d'un pygmoïde, appartenant aux Boshimans et aux Hottentots de l'Afrique australe, ces derniers pratiquant l'élevage. (Page 41)

2Selon toujours Louis de Lacger"Les bahutu ont crée la colonisation du Rwanda par noyaux de peuplement installés au dessus ou à la proximité des points d'eau. Pas de grands domaines; de toutes petites exploitations, deux hectares environ suffisantsà l'alimentation frugale d'une famille entière; une culture intensive de caractère horticole. Ce cultivateur est un artisan, mais adonné seulement à des industries domestiques; il sait moudre le grain, bâtir sa chaumière, tresser les fibres, appointir un pal, creuser un mortier et une cuve, voire une pirogue, dans un tronc d'arbre, modeler un pot..." A l'origine, il dut cultiver avec une houe de bois... Mais en pénétrant l'Afrique, il a trouvé une industrie du fer: dès lors, il a adopté la pioche, hache, massue, couteau, serpette, erminette, framée, sagaie, grelot, anneau métallique. Il ne descends pas en ligne droite du chasseur ni du pasteur petit ou grand. Ce qui le prouve c'est qu'il répugne à manger aucune viande de gibier ni de petit bétail: il ne boit même pas le lait de la brebis ni de la chèvre qu'il élève. S'il a mangé du boeuf et bu du lait de vache, c'est par une sorte de snobisme, pour imiter le noble étranger, le mututsi.

L'auteur s'interroge également sur leur origine et tente une réponse. "D'oùvenaient ces conquérants pacifiques, et à quel rameau de la grande famille humaine se rattachent-ils? Ici encore comme pour les batwa, l'histoire est muette. Seules, la géographie, l'anthropologie, l'ethnographie projettent quelques clartés aidant à la solution du problème. Le type physique du muhutu est le type le plus commun et le plus général du noir, non seulement ce de celui qui, parlant un dialecte des langues dites bantu, mais encore de celui qui peuple la Mélanésie océanienne: taille moyenne de 1,67 m, coloration très foncée de la peau et frisure des cheveux, brachycéphale et prognathisme, nez écrasé et lèvres épaisses, belle proportion des membres; ethnologiquement et au moral, sédentarisé, goût et aptitudes agronomiques, organisation patriarcale, simplicité de moeurs, sociabilité et jovialité; en religion, hénothéisme et culte des mânes, confiance illimitée dans la sagesse et la technique surnaturelle des griots... Plus prolifiques que les pygmées et les pygmoïdes chasseurs et errants, ils se sont substitués à eux dans la même zone tropicale de la planète, les reléguant dans la forêt. Comme eux, ils avaient, estime-t-on, pour berceau en Australie et ils les suivirent dans leur odyssée, mais longtemps après. Tels ont les voit en Papouasie, tels on les retrouve, avec des différences régionales, aux Mascareignes, à Madagascar, aux Comores. D'île en île ils auraient, autres conquistadores, atteint et découvert un nouveau continent. Mouillant au littoral de l'océan Indien, ils auraient gagné de proche en proche, vers l'ouestjusqu'aux rives de l'Atlantique, au nord et au sud jusqu'au déserts du Sahara et du Kalahari, entrant en contact, là avec les blancs bronzés et les négritisant, ici avec les noirs aborigènes fusionnant avec eux, implantant partout par effet de leur sédentarité leur croyances, leurs institutions et jusqu'à leurs langues agglutinatives, le "bantu", la langue "humaine" par excellence, - bantu signifiant "les hommes"- fractionnées en maints dialectes. (Lire de la Page 46 à 49)

3 D'après Louis de Lacger, les Batutsi constituentune branche des Kouschites, ethiopiens ou hamites. "Les seigneurs bouviers ou vachers, d'où viennent-ils ? Quand on arrive dans la Haute-Egypte ou des plateaux d'Abyssinie au Ruanda, on les reconnaît de suite. On a déjà vu ces hommes de haute taille, atteignant la moyenne de 1,79 m. et dépassant deux mètres chez quelques géants, minces de corps, aux membres longs et grêles, réguliers de traits, de port noble, graves et hautains. Ce sont des frères des Nubiens, des Galla, des Danakil. Ils ont le type caucasique et tiennent du sémite de l'Asie antérieure. Mais, ils sont noirs de teint, parfois cuivré et olivâtres; leurs cheveux sont crépus; les femmes sont affectées d'une stéatopygie souvent très accusées, autant de trait empruntés aux Bantous et qui témoignent d'un commerce prolongé avec eux. .." Avantd'êtreainsi négritisées ces hommes étaient ainsi bronzés. Les Grecs qui les avaient visités au royaume de Méroé ou rencontrés sur le littoral méditerranéen, à Jérusalem comme à Alexandrie, avaient été "frappés de leur teint foncé et les avaient appelés "visage brûlés" ætiops. Les Romains, adoptant ce terme, l'appliquaient aux Maures nomades des confins sahariens au sud de l'Atlas. Les Arabes traduisirent dans leur langue " éthiopiens" par "hamite", mot qui signifie"brun rougeâtre".

Concernant l'infiltrations de ces "hamites " en pays bantou l'auteur nous dit " La région des grands lacs est un eldorado pour ces pasteurs , dont les bêtes pacifiques et pesantes n'autorisent pas les grands raids de conquêtes et des pillages: espaces libres, gras pâturages, population généralement clairsemée, timide et accueillante. Ils se faufillent par clans entre les ethnarchies indigènes, comme Jadis, comme Jadis Abraham et Loth entre les cités cananéennes. Ils se répandirent jusqu'au delà du Kivu et de la Rusizi à l'ouest, jusqu'aux rives du lac Tanganyika et du Nyassa au sud, jusqu'aux pentes du Kilimandjaro à l'est. Leurs familles ont des sorts différents. Tantôt elles s'isolent dans des districts hébreux qui leur suffisent: tels les batutsi du Bigogwe et leurs congénèresdu Bunyabungo. Tantôt, elles s'allient aux sédentaires et vivent en symbiose avec eux: ainsi, dans le Nkole, qui est devenu pour les voisins rouandiens, le Buhima, c'est-à-dire le pays des Bahima, non régional des Hamites, et pareillement dans le Ngorwa et le Karagwe où on les appelle Banyambo. Tantôt comme dans l'Uganda, ils fournissent simplement auxagricullteurs autochtones leur dynastie régnante et leur cheptel: les riches se procurent auprès d'eux des bovinset les font garder par eux. On les rencontre encore dans des conditions diverses parmi les Banyamezi de Tabora et les Bafipa du Tanganyika. C'est dans l'Urundi et principalement au Ruanda qu'ils ont donné toute leur mesure et ont fondé des empires marqués à leur coin. Nulle part neanmoins, ils n'ont imposé leur langue, ni les mêmes usages et institutions qui pouvaient leur êtrepropres. Tout au contraire ils ont adopté parler, moeurs, coutumes des populations noires, dont ils devenaient des hôtes, quand ce n'était pas les seigneurs et les guides, reconnaissant ainsi leur supériorité culturelle. Nomades noyés dans la masse des sédentaires, ils ont pris naturellement les façons de vivre de ceux -ci, tels les Germains barbares au milieu des populations latinisées de Gaule, d'Espagne et d'Italie..."

Dans l'ensemble, les Batutsi purs de race ne sont peut être plus de cinq pour cent, mais ce pourcentage est doublé ou triplé par le nombre de ceux qui se réclament à quelque titre de leur parenté hautement prisé.Ils ne sont qu'une faible minorité mais c'est une minorité dirigeante. Leur suprématie n'est pas contestée. A quoi tient-elle ? A trois éléments: l'un racial, leur supériorité physique; ce sont des gens de haute mine et qui imposent ; chez les simples et les demi-civilisés, la taille, le port, la noblesse des traits générateurs de prestige et d'ascendant; l'autre économique: ce sont des magnats, dont la richesse est constituée par de grands troupeaux de bovins- des bene inka ; le troisième politique ce sont des hommes nés pour le commandement, tel le romain de Virgile" (Lire de la P.54 à la P. 56)

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