Bujumbura, le 30 juin 2015 (Net Press). C’est pour montrer à quel point les électeurs de la capitale n’ont pas répondu au scrutin des communales et députés quand on a vu qu’au centre ville, sauf les policiers, il n’y avait personne dans la rue quand un reporter de Net Press a fait le tour de la ville pour constater l’ambiance qui y régnait. Boutiques, magasins, restaurants, pharmacies, supermarchés, banques, tous ces lieux étaient fermés toute la journée. Les gens qu’on pouvait voir étaient ceux qui venaient acheter les unités à la Regideso car le seul service de cette entreprise qui commercialise l’eau et l’électricité était ouvert.
Les électeurs au centre ville à l’Athénée primaire, à l’école Stella Matutina et au jardin public venaient au compte goûte et ceux qui étaient en train de voter étaient des militaires et des policiers qui, selon des informations reçues sur place, devaient voter même s’ils ne le voulaient pas, de peur d’être sanctionnés sévèrement par leurs chefs. Sur ces bureaux de vote et même d’autres des quartiers de la ville, les facilitateurs de ce scrutin étaient pratiquement désœuvrés et ceux qui avaient des téléphones mobiles étaient en train de manipuler les messages Whatsup suite à un nombre moins important de votants.
Burundi - Elections.
En commune urbaine de Musaga, les électeurs n’ont pas répondu massivement hier aux élections.
Bujumbura, le 30 juin 2015 (Net Press). A part que les élections ont commencé un peu tard, le nombre d’électeurs aux bureaux de vote de la commune urbaine de Musaga était très faible.
En effet, on observait un grand nombre de soldats et policiers sur le terrain ou se sont déroulées les élections et très peu de citoyens sur la ligne. Contactés par notre reporter, les habitants de la commune urbaine de Musaga se disaient très agréablement surpris même de ce petit nombre dans les bureaux de vote alors que ce quartier subit jour et nuit des tirs de la part des policiers sensés leur protéger.
Signalons que ceux qui ont pu voter n’acceptaient pas d’accorder une interview aux journalistes, ils y allaient timidement suite à des tensions qui caractérisent les quartiers de la capitale Bujumbura.
Malgré cette situation, le comptage des voix a commencé dans la soirée d’hier et contre toute attente, les partis politiques et coalitions qui n’avaient pas participé aux scrutins ont été élus. C’est le cas d’Agathon Rwasa, président des Indépendants de l’Espoir, s’est vu attribuer la deuxième place avant les partis satellites comme le Fnl de Jacques Bigirimana et l’Uprona du tandem Concilie – Gaston. L’on se demande donc le pourquoi de ce jeu cnddfddien encadré par la Ceni de Pierre-Calver Ndayicariye. Ce dernier est allé jusqu’à déclarer que ces partis n’ont pas quitté la course présidentielle, raison pour laquelle ils auront droit à des pourcentage et qu’en cas de désistement, ce président, fort de son laboratoire, va voir comment redistribuer de nouveau les pourcentages.
Le président de l’Adc-Ikibiri et Frodebu, Léonce Ngendakumana, a refusé que la Ceni lui donne un pourcentage des élections alors qu’il n’a participé, ni dans sa formation politique, ni dans sa coalition. Pour lui, c’est une politique du parti au pouvoir de diviser les partis politiques et leurs membres.
Quant aux Indépendants de l’Espoir, un membre contacté a indiqué que s’ils avaient pris part à la campagne, ils auraient été de loin les premiers. Mais pour le moment, ils ne comprennent pas d’où vient le score qui est aujourd’hui le leur, d’où le soupçon de la manipulation du fichier électoral de Ndayicariye qui était inaccessible à toute autre personne, surtout de l’opposition.
Burundi – Elections
Des réactions tous azimuts de la part de la communauté internationale
Bruxelles, le 30 juin 2015 (Net Press). Malgré une demande insistante de la communauté internationale de reporter les élections législatives et communales, ces dernières ont été organisées ce lundi 29 juin comme prévu. Ce forcing des autorités burundaises malgré de vives protestations, jusque même dans les enceintes du Cndd-Fdd, ont occasionné beaucoup de réactions à travers le monde.
Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des affaires étrangères, se dit gravement préoccupé par les élections législatives et communales au Burundi ce 29 juin 2015. Pour lui, la Belgique déplore que le Burundi ait choisi d’ignorer les recommandations de l’Ua et de la Cae qui, pourtant, visent une solution consensuelle et de dialogue. En termes clairs, le ministre belge des affaires étrangères estime que ces élections ne sont ni crédibles, ni de nature à résoudre la crise au Burundi. Ce qui risque de diviser davantage le pays, trouve-t-il. Malgré cela, son pays continue à soutenir les efforts de facilitation internationale et invite le gouvernement du Burundi à tenir compte des positions énoncées par les instances africaines et les Nations unies.
De son côté, la porte-parole du service d’action extérieure de l’Union européenne sur la situation au Burundi indique que la décision d’ignorer la dernière position de la facilitation internationale menée par l’Union africaine, la Cae, la Cirgl et les Nations unies de reporter les élections constitue un fait grave. Pour elle, l’Union européenne réaffirme son soutien à la facilitation et retire définitivement sa mission d’observation électorale. Par contre, la détermination du gouvernement du Burundi l’expose en outre à des mesures additionnelles dans le cadre de l’article 96 de l’accord de Cotonou comme indiqué dans les conclusions du conseil de l’Ue sur le Burundi du 22 juin 2015.
L’Ue estime que la situation pose des risques croissants pour les droits de l’homme de tous les Burundais. Dans tous les cas, il n’y a pas d’alternative, tous les Burundais doivent continuer à rechercher une solution consensuelle à travers le dialogue et en rejetant la violence. Elle invite enfin le gouvernement du Burundi à entrer dans cette logique.
Même le Quai d’Orsay de l’Hexagone appelle au dialogue politique. La France est également préoccupée par la détérioration de la situation politique, sécuritaire et économique du Burundi. Tout comme l’Ua et l’Ue, la France considère que les conditions indispensables à la tenue d’élections pacifiques et crédibles ne sont actuellement pas réunies.
Elle exhorte enfin l’ensemble des acteurs burundais à reprendre sans délai le dialogue, comme le propose l’Ua, la Cae, la Cirgl, et les Nations unies, afin de trouver une solution consensuelle à la crise dans le respect des textes et des principes existants.
Même l’Union africaine, par la voie de la présidente de la commission de cette institution, Dlamini Zuma, n’a pas de langage différent au regard des élections de ce 29 juin au Burundi. Elle parle du report, du dialogue et d’une solution consensuelle, ce qui montre par A+B que les déclarations sur le Burundi ont été érigées de façon consensuelle, raison pour laquelle les partenaires voudraient également une solution consensuelle sur la crise au Burundi.
Burundi – Elections - Histoire
1965 : une année électorale dominée par l’assassinat de Pierre Ngendandumwe et l’attaque du palais royal.
Bujumbura, le 30 juin 2015 (Net Press). Sur le plan politique, l’année 1965 ne pouvait pas commencer dans des conditions plus mauvaises. Dans la soirée du 15 janvier, Pierre Ngendandumwe, un leader charismatique hutu qui venait d’être désigné premier ministre par le roi, se rendit à la clinique Prince Louis Rwagasore pour féliciter son épouse qui venait de lui donner un enfant.
Il s’y rendit sans escorte au volant de sa voiture Peugeot 404 (N.B. les dignitaires de l’époque se déplaçaient seuls dans leurs véhicules, y compris Mwambutsa lors de la plupart de ses déplacements, même à l’intérieur du pays).
Alors qu’il sortait de la clinique, il fut mortellement atteint de plusieurs balles en pleine poitrine, et le Burundi fut à nouveau plongé dans le deuil qui rappela celui du 13 octobre 1961
Toute la vie politique qui suivit ainsi que les élections de l’automne furent dominées par la Révolution sociale rwandaise de 1959 (chasse aux Tutsi et prise du pouvoir par les Hutu). Et c’est tout « naturellement » que ce scrutin fut suivi deux ou trois semaines après par l’attaque sur le palais royal, que Mwambutsa parvint à quitter par miracle pour s’enfuir en Suisse d’où il ne reviendra jamais et où il mourra en février 1977.
Ces élections furent les dernières de la période monarchique puisqu’une année plus tard, ce fut le coup d’Etat de Michel Micombero le 28 novembre 1966 qui ouvrit la voie à l’ère républicaine que nous vivons à ce jour.
Burundi – Elections - Histoire
Si l’historique des élections burundaises vous était conté.
18 septembre 1961 : les élections les plus « propres » et les plus consensuelles.
S’il est un scrutin qui n’a jamais fait l’objet d’aucune contestation dans l’histoire des élections de notre pays, c’est bien celui du 18 septembre 1961, qui précéda de quelques mois l’accession du Burundi à l’indépendance. Il est vrai que ces élections furent exceptionnelles à plus d’un titre. Non seulement le colonisateur était encore et entendait prolonger sa présence, mais aussi il y avait le prince Louis Rwagasore qui dominait de la tête et des épaules toute la classe politique, avec un tel charisme qu’il fut éliminé moins d’un mois plus tard, parce que Jean Pierre Harroy, le gouverneur général du Rwanda-Urundi, ne supportait pas une telle figure qui réclamait l’indépendance « pour tout de suite ». Le drame de son assassinat ne parviendra pas à éloigner la date de l’indépendance qui fut proclamée le 1er juillet 1962. Mais l’histoire de notre pays retiendra que le scrutin du 18 septembre 1961 fut le premier et le dernier à s’être déroulé dans un certain esprit de fraternité, peut être en raison de la présence d’un homme à la carrure exceptionnelle et aux talents politiques hors du commun : le fils aîné du roi Mwambutsa IV Bangiricenge.
Sous Micombero, sous Bagaza et sous Buyoya I : une urne blanche, une urne noire.
Jusqu’à l’élection présidentielle du 1er juin 1993 qui porta Melchior Ndadaye au pouvoir, les trois premiers présidents de ce pays, Michel Micombero, Jean-Baptiste Bagaza et Pierre Buyoya, tous nés à Rutovu en 1940, en 1946 et en 1949, ont organisé des consultations électorales.
Sous Micombero et sous Bagaza, les électeurs qui votaient pour les présidents en place déposaient leur bulletin de vote dans une urne totalement blanche et ceux qui exprimaient leur refus déposaient leur bulletin dans une urne complètement noire.
Il faut préciser que dans certains coins de l’intérieur du pays, les officiels de l’administration et du parti Uprona suivaient le vote dans les locaux ad hoc. On aura compris qu’en plus que le pays était géré par le système politique du parti unique, la couleur blanche et noire influençait les électeurs de façon déterminante, car voter « noir » signifiait qu’on était un opposant notoire du chef d’Etat en compétition « avec personne », puisqu’il était le candidat unique.
Personne ne pouvait donc risquer de courir un tel danger, sauf un seul qui le fit publiquement et à qui rien n’arriva. C’était lors de la présidentielle de 1975 et le candidat unique était le lieutenant-général Michel Micombero.
Comme le système d’isoloir n’existait pas encore et qu’il était assuré d’avoir plus de 90% de suffrages, il se dirigea directement vers l’urne peinte en noir et y déposa son bulletin de vote. Cette histoire amusante fit le tour de tout le Burundi et certains s’en souviennent encore pour en rigoler 40 plus tard, jusqu’à la rédaction de Net Press.